Chroniques courtoises

Pirates : une communauté interculturelle en haute mer

Les ports pirates de la Tierra Firme et la mer des Caraïbes vers 1670Simeon Netchev (CC BY-NC-ND)

La piraterie est un phénomène bien connu qui existe depuis les origines de la navigation, mais dont l’âge d’or fut entre les années 1680 et 1730. Comme le dit l’archéologue Jean Soulat : “Ces pirates cherchaient à fuir une vie compliquée dans les rues de Bristol, de Londres ou de Paris, pour ce désir d’aventure, d’exotisme et essayer de devenir riche”.
 
Cette envie de liberté en a séduit plus d’un, rendant la piraterie un véritable phénomène interculturel, réunissant des hommes venant de monde entier. Irlandais, Antillais, Français ou encore Espagnols constituent un ensemble cosmopolite. Par exemple, l’épave du Speaker, coulé en 1702 au large de l’île Maurice, a livré une quarantaine de monnaies en or et en argent, qui venaient de 20 pays différents.
 
Les pirates étaient aussi connu pour leur activité au large de la côte ouest-africaine. Effectivement, les navires exerçant le commerce triangulaire étaient remplis de marchandises en tout genre et étaient donc souvent attaqués par des pirates. Lorsqu’ils trouvaient des navires de vendeurs d’esclaves, les pirates libéraient souvent les hommes qui devenaient ainsi des membres de l’équipage. Parfois, jusqu’à un tiers des pirates était d’origine africaine.
 
Au croisement des populations, la communication devient complexe. Au sein du navire pirate, elle était marquée par la diversité linguistique des membres de l’équipage et par le développement de codes propres à la vie des pirates, le plus souvent dictés par le capitaine du navire. Leur jargon était donc un mélange atypique de français, d’anglais, d’espagnol, et entièrement propre à chaque navire. Les pirates pouvaient venir de tous les ports d’Europe ou des colonies d’Amérique, et développaient donc leur propre système de communication partagé.
 
Les pirates utilisaient également un mode de communication silencieux qui les avantageait fortement durant les batailles. L’organisation pirate reposait sur une série de signaux, de gestes et de conventions non verbales pour coordonner les actions, qui pouvaient signifier l’attaque, le repli, ou l’attente du moment opportun pour attaquer. Les actions des pirates étaient souvent rapides, s’appuyant sur l’effet de surprise. La communication silencieuse leur conférait donc un avantage décisif avec la synchronisation d’un équipage multiethnique sans la barrière de la langue.
 
Dès lors, la piraterie était un véritable vecteur d’échanges culturels entre les populations, notamment
aux XVIIe et XVIIIe siècles. Loin de se limiter à une simple activité criminelle, la piraterie apparaît comme un facteur important d’échanges interculturels à une époque de grands bouleversements maritimes.  Derrière le cliché des pirates à la Jack Sparrow, on trouve un réel équipage interculturel et multiethnique.